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Édito n°5

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Freud, dans Malaise dans la civi­li­sa­tion, indique les impasses des rela­tions à autrui dans les­quelles l’espèce humaine peut se retrou­ver, impasses où il est ques­tion d’impossible, la souf­france ne se rédui­sant nul­le­ment à un dys­fonc­tion­ne­ment. Il n’était pas sans savoir que les pro­grès humains du côté de la science et de la rai­son ne seraient pas pour autant une avan­cée pour le pro­grès moral.

Le signi­fiant « har­cè­le­ment » prend une cer­taine ampleur depuis quelque temps et se pro­page dans le champ sco­laire : défi­ni­tions, enquêtes, pro­to­coles, for­ma­tions sont là pour essayer d’enserrer les phé­no­mènes recou­verts par ce mot, dans l’espoir de le contrer.

Dans ce numé­ro du Zappeur, vous lirez une manière inédite de sai­sir le har­cè­le­ment, sans doute parce qu’il n’y est pas pris uni­que­ment dans la logique binaire du bour­reau et de la vic­time. Il tient compte de la pul­sion de mort intrin­sèque à la jouis­sance des par­lêtres. Le har­cè­le­ment est sans doute une des figures de la haine ordi­naire face à une langue réduite à l’utilitaire et au binaire, inca­pable de tenir à dis­tance la dis­cor­dance entre la pul­sion de mort et la pul­sion de vie.

Les textes de Claudine Valette-Damase, de Claire Brisson et Ariane Oger nous ouvrent de nou­velles portes sur ce que recouvre le mot « harcèlement ».

La pre­mière esquisse le lien entre le har­cè­le­ment et la peur, ce qui ne peut se résor­ber par les régle­men­ta­tions. Elle invite à ne pas renon­cer à faire mon­ter le sujet sur la scène de l’énonciation.

La seconde nous indique avec jus­tesse, que sor­tir du silence pour dire n’est pas chose aisée. Par ailleurs, un dis­cours qui iden­ti­fie ne suf­fit pas pour s’extraire de la haine, qui vise l’être. Le sujet aura à trou­ver un dire afin que de sa réponse, il soit responsable.

Enfin la troi­sième nous emmène vers la com­plexi­té de la langue, nul­le­ment réduite à un simple outil de com­mu­ni­ca­tion. Elle inter­roge le rap­port à la parole et au signi­fiant ain­si qu’à l’objet pour abor­der la ques­tion du harcèlement.

Les textes de Béatrice Brault, de Sandra Ruchard, d’Ariane Chottin et Sonia Pent font scin­tiller dif­fé­rents effets du phé­no­mène et la manière dont cha­cune manœuvre pour ouvrir, dans le champ de sa pra­tique, un espace de res­pi­ra­tion afin que chaque un trouve à se déprendre de ce avec quoi il est aux prises.

Ainsi Béatrice Brault nous indique com­ment, dans une mater­nelle, le signi­fiant « har­cè­le­ment », issu d’une plainte paren­tale, joue la carte de la ségré­ga­tion dans un appel à un Autre sus­cep­tible de répondre à la peur de ces parents face à leur jeune enfant.

Sandra Ruchard nous retrace le par­cours impres­sion­nant d’un gar­çon de huit ans har­ce­lé par la langue. Par des détours à nuls autres pareils et sui­vis avec doci­li­té par son ins­ti­tu­trice, cet enfant entre dans l’écriture.

Enfin, à par­tir d’une conver­sa­tion dans un col­lège, Ariane Chottin et Sonia Pent prennent le par­ti de rendre la langue vivante en fai­sant un usage sin­gu­lier de l’écriture, ouvrant par cette manœuvre une autre dimen­sion du dire, une « dit-mansion », selon le mot de Lacan, où les mots ne collent plus à la peau et trouvent à réson­ner autrement.

Passer du phé­no­mène du har­cè­le­ment à sa logique, change la donne.

Ariane Oger et Claire Piette

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