Perspectives

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Perspectives

Par Judith Miller

La création de l’Institut psychanalytique de l’Enfant : un pas

De quoi s’agit-il ? De protéger des bonnes intentions et préventions diverses dont l’enfant est actuellement l’objet. Elles sont en effet au service du maître, et partant parfaitement conformistes et aveugles au sur mesure, attachées obstinément à Lanorme. Les unes et les autres se convertissent en effet en mesures dites « sociales », dont nombre de citoyens s’effarent.

Du même mouvement, il s’agit d’affirmer, preuves démonstratives à l’appui, le havre et la bonne heure que constitue le discours analytique pour ceux des enfants qui se confrontent à un réel qui les entrave dans des difficultés apparemment insurmontables.

Comme leurs aînés, et sans doute davantage qu’eux, bien des enfants ne sauraient trouver une issue aux embrouilles du réel sans s’adresser à qui est formé à recevoir au un par un celui qui se trouve dans l’impasse. Les enfants se voient aujourd’hui voués à une alternative, résister ou céder, d’où l’angoisse assurée des uns et les épinglages des autres du nom de « troubles », dont la déclinaison, s’ils n’avaient des suites ravageantes, ferait rire.

Bien des parents sont demandeurs de ces « bonnes intentions », elles rassurent dans un premier temps, au terme duquel se découvre dans quel chemin de croix elles mènent parents et enfants. Alors un trouble authentique saisit chacun, s’il est demeuré susceptible d’en ressentir les effets, en échappant à un conditionnement programmé pour masquer la singularité.

Ces bonnes intentions sont en effet sourdes aux épreuves que chaque enfant traverse immanquablement. Elles préjugent sans vergogne de leur destin au nom du « développement normal » : enfants et jeunes se verront réduits coûte que coûte, et de la façon la plus économique possible, aux décrets de l’expert ou passés à la moulinette de mesures préventives. Le soupçon se généralise, au crible de tests dont la cruauté surprend (voir par exemple le test dénommé Dominique Interactif).

Tout est à inventer

Les enseignements tirés de la pratique psychanalytique sont attendus par ceux qui travaillent dans les institutions qui accueillent les sujets en grande détresse, et dans celles que fréquentent ordinairement ou exceptionnellement les enfants (écoles, crèches, cabinets médicaux, centres de loisirs, instances judiciaires etc.). Combien baissent les bras devant des protocoles et des programmes indigestes à leurs bonnes volontés ? Combien en souffrent en vain ? Combien ont déjà osé se permettre de sortir des voies protocolaires et préprogrammées, et ont pu découvrir ainsi les joies de l’invention que le sur mesure demande et suscite ?

Tout est encore à inventer dans notre époque qui est celle d’une mutation dont les retombées restent imprévisibles et peuvent conduire au pire de l’enfer pavé des meilleures intentions, c’est-à-dire à d’une ségrégation renforcée au nom du « tous pareils ». L’invention, la résistance sans nostalgie viennent de ce discours de l’analyste qui éclaire les trois autres discours formalisés par Lacan.

Viser à la singularité absolue et non à la promotion de recettes universelles, ce n’est pas viser à l’individu socio-biologico-génétique, c’est cerner le réel dont chaque être parlant est la réponse, dans sa contingence et un choix insondable à lui-même. Il est certain que la place qu’occupe un analyste, de par sa formation, lui permet d’aborder autrement que parents et grands-parents les questions auxquelles répond un enfant dans ses refus, ses acquiescements, ses identifications, ses succès et ses fictions. Aussi concerné soit-il, il est de cette place en mesure de permettre à l’enfant d’explorer les coordonnées du sujet à part entière qu’il est.

Des pépites

Ces principes sont à l’œuvre dans chaque pépite dont fourmille l’enseignement de Jacques Lacan à propos des enfants. Je ne citerai ici, pour étayer la mise en œuvre de ces principes, que l’élucidation proposée par Lacan, dans Je parle aux murs[1], de l’obtusion de certains aux mathématique. Elle leur suppose de piger, si ce n’est la différence des quatre causalités aristotéliciennes, du moins de repérer de laquelle la science relève. Quelle plus belle invitation à transmettre ce que nous apprenons des enfants ?

[1] Lacan J., Je parle aux murs, Entretiens de la chapelle de Sainte-Anne, Paris, Seuil, 2011.

Ce texte est composé de larges extraits de la Préface donnée par Judith Miller pour la publication du premier volume de la Collection La petite Girafe Peurs d’enfant, paru aux éditions Navarin en octobre 2011.