Dans son « Allocution sur les psychoses de l’enfant », Lacan nous ouvrait déjà en 1967 à la lecture de ce qui n’étaient alors que les prémisses de la réalité actuelle des institutions. Nous en constatons toujours plus précisément les conséquences : d’une part, le champ de la santé mentale a intégré le domaine de l’exercice du pouvoir bureaucratique, sous la forme des protocoles qui coûtent cher et servent peu[1] – d’autre part, l’idéologie du tout-neuro a pris le pas sur la matière et la fonction du langage, voulant toujours plus annuler l’inconscient, en nommant ses formations du côté du « trouble », « dys », d’un dys-fonctionnement à rectifier en vue d’inclusion[2].
Alors, oui, « Le réel est devenu neuro-réel ; c’est le neuro-réel qui est appelé à dominer les années qui viennent[3]», et ce d’autant que cette idéologie semble offrir la certitude simple qui permet de rompre avec le doute généralisé caractéristique de notre temps[4]. Soit !
Alors, « À nous de savoir comment faire avec ce neuro-réel[5]» et l’institution qui s’en déduit, pour qu’y soient accueillis l’exaspéré et le terrible. À ce titre, Jean-Pierre Rouillon nous invite à « considérer ces changements en prenant en compte la dimension du symptôme » et à prendre appui sur lalangue, « plutôt que sur la promesse de lendemains qui chantent ».
[1] Cf. Aflalo A., Intervention dans le cadre du cours de Jacques-Alain Miller du 28 janvier 2004, disponible sur internet.
[2] Cf. Castanet H. Neurologie versus psychanalyse, Paris, Navarin, 2022.
[3] Miller, J.-A., « Neuro‑, le nouveau réel », La Cause du désir, n°98, mars 2018, p. 117
[4] Cf. Dupont L., Entretien avec David Chavalarias, « Toxic data : comment les réseaux sociaux manipulent nos opinions », Lacan Web Télévision, 23 octobre 2022, disponible sur internet.
[5] Miller, J.-A., « Neuro‑, le nouveau réel », La Cause du désir, n°98, mars 2018, p. 117.