8e Journée d'Étude

Rêves et fantasmes chez l’enfant

samedi 22 mars 2025

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Édito n°10 : Graine de violence

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La pré­pa­ra­tion de la Journée « Enfants vio­lents » bat son plein. Ce nou­veau numé­ro du Zappeur reflète les mul­tiples direc­tions dans les­quelles le thème est explo­ré : le ciné­ma, la lit­té­ra­ture, la cli­nique… Tout cela ne déflore en rien le conte­nu lui-même de la Journée, lequel consti­tue­ra le point d’orgue de deux années de tra­vail impul­sées par le for­mi­dable texte de Jacques-Alain Miller[1]Miller J.-A., « Enfants vio­lents », Après l’enfance, Paris, Navarin, coll. La petite Girafe, p. 195–207. au sein de l’Institut de l’enfant.

Ainsi nous arrive-t-il de lire l’actualité au prisme de ce thème, et par­fois de décou­vrir au détour d’un article une pépite qui éclaire notre recherche. Tel ce témoi­gnage de Tim Raue, jeune chef alle­mand dou­ble­ment étoi­lé, lorsqu’il affirme : « Je ne serais pas deve­nu chef étoi­lé s’il n’y avait pas eu cette force des­truc­trice en moi […] contre laquelle je me bats tous les jours depuis trente ans. »[2]Luyssen J. « Tim Raue, De l’aigre au goût », article paru dans le jour­nal Libération, édi­tion du 26/27 jan­vier 2019. Celui-ci a ren­con­tré « une graine de vio­lence » lorsqu’il était enfant et qu’il a su trans­for­mer en force créa­trice. « Cette graine était comme poin­tée direc­te­ment vers mon esto­mac. Elle a gros­si, jour après jour. »[3]Ibid. Cette vio­lence, d’abord subie, se trans­for­ma le jour où il ren­tra chez lui et qu’il trou­va son père qui l’attendait dans le salon : « Il avait bu. Il me dit que je ne suis qu’un bon à rien, un débile, que je n’arriverai à rien. Il me bous­cule et com­mence à vou­loir me taper, mais je par­viens à l’éviter et je le jette au sol. Quelque chose dans mon regard fait qu’il ne s’est pas levé. C’est la der­nière fois qu’il a essayé de me frap­per. J’ai ce regard en moi depuis. Cela conti­nue à être une expres­sion chez moi qui sym­bo­lise ça, la cen­trale nucléaire dia­bo­lique que ces humi­lia­tions enfan­tines ont construite en moi. Pendant de longues années, j’ai uti­li­sé ça comme une arme, un tic non ver­bal qui tue­rait toute dis­cus­sion dans l’œuf. C’est seule­ment avec le temps que j’ai réus­si […] à uti­li­ser cette éner­gie pour créer des plats. »[4]Ibid.

Pour la psy­cha­na­lyse, la graine de vio­lence est à consi­dé­rer avec res­pect, car elle peut être source de vie.

Hervé Damase

Notes

Notes
1 Miller J.-A., « Enfants vio­lents », Après l’enfance, Paris, Navarin, coll. La petite Girafe, p. 195–207.
2 Luyssen J. « Tim Raue, De l’aigre au goût », article paru dans le jour­nal Libération, édi­tion du 26/27 jan­vier 2019.
3, 4 Ibid.